Ce chercheur américain a beaucoup publié sur l’environnement juif de la naissance du mouvement chrétien. Comme il le dit à juste titre, « Jesus’ identity, role, teaching, and practice have still not been fully understood in their original Jewish contexts ». Dans cet essai, il fait un point très bien informé d’abord sur la question de la source Q, puis sur celle de la non violence de Jésus (critiquant sobrement mais nettement les conclusions du Jesus’ seminar et de R. Horsley sur un Jésus révolutionnaire violent; elles ne cadrent vraiment pas avec les données). Mais le plus intéressant se trouve plus loin, dans les chapitres consacrés au Fils de l’homme dans Hénoch. « The Parables’ “son of man” tradition and the Animal Apocalypse’s Adamic figure represent the two most relevant messianic models or templates for Jesus research ». En conséquence, il pense qu’une des réticences de Jésus envers, pour l’appeler ainsi, la ligne messianique davidique, est son refus profond et conscient de la violence: « the historical and theological implications of an historically nonviolent Jesus have not yet been adequately integrated into the discipline », ce qui n’est pas toujours perçu. Il faut en effet rappeler que ce n’est pas simple du tout de se dire quelles étaient les conceptions messianiques à l’époque: « Given the diversity of messianic texts and traditions in Second Temple Judaism, there does not seem to have been any unified Jewish messianic expectation at the time of Jesus, nor any single, identifiable role for a messiah to fulfill. » Il met bien en valeur l’importance de certains documents de Qumran comme 4Q521: « In “the whole of Jewish literature between the Bible and the Mishnah, it is only in 4Q521 and the Jesus saying” in Q that Isaiah 61 is expanded with a statement about the raising of the dead ». Je suis en général bien en consonance avec les positions défendues: elles sont présentées de façon sobre et claire, après avoir pris en compte une documentation impressionnante. Cependant, lorsqu’il conclut que Marc combine Q et Hénoch pour son Fils de l’homme souffrant, ou encore conclue que « Q’s concurrent identification of Jesus as the Enochic son of man and the Enochic/Adamic Son of God conflates two distinct roles: the end-time judge and the transforming Adamic messiah », je ne vois pas très bien pourquoi ce rapprochement ne pourrait pas avoir été effectué par Jésus lui-même (et, au fond, de façon plus probable) et non pas par la première génération chrétienne. Un ouvrage dense et austère mais vraiment intéressant.