Un film de Todd Field avec Cate Blanchett, Nina Hoss, Noémie Merlant, Adam Gopnik, Marc-Martin Straub. Lydia Tár est une chef d’orchestre encensée au Philarmonique de Berlin; c’est une femme intelligente et déterminée. Cette femme puissante, au sommet de son art et de sa carrière, est également une personne qui abuse de son pouvoir et l’utilise pour séduire puis détruire de jeunes musiciennes. Le scénario est fin, la réalisation maîtrisée et Cate Blanchett est vraiment exceptionnelle. En effet, elle rend son personnage complexe: ses angoisses sur le bruit, son complexe vis-à-vis de ses origines modestes (délicatement suggéré), son intelligence vive de la musique (elle n’a pas tort dans sa réplique au jeune de Julliard). C’est sans doute un signe des temps que le film ne se centre pas sur un riche banquier ou avocat ou chef d’entreprise homme mais sur une femme, qui plus est lesbienne. Bref, d’un point de vue cinématographique (actrices (bonheur de retrouver la remarquable Nina Hoss), photographie, musique, réalisation, etc.), ce film est presque parfait (j’ai une petite hésitation sur la structuration de la fin mais c’est un détail). On ne saurait mieux montrer comme le pouvoir corrompt, illustrant à merveille la maxime romaine, corruptio optimi pessima. De ce point de vue là, ce n’est pas sans analogie avec la situation ecclésiale: un évêque n’est-il pas également une sorte de chef d’orchestre ayant un pouvoir sur tous les acteurs de la pastorale? Ceci dit, le film est froid, clinique, dominé par le gris, implacable. La réalisation est plus cérébrale et moins empathique que celle de Spielberg. Rendez-vous aux Oscars!
Bigné
Bonjour,
… « le pouvoir corrompt » surtout pour une personne comme Lydia qui veut gravir le sommet par tous les moyens comme le lui reproche Sharon.
Mais aussi – plus subtilement, parce que bien moins développé (et ce n’est pas un mal ; cela évite des digressions ou de se perdre) :
1/ que le pouvoir attire ceux (comme Olga) qui veulent réussir et qui se jouent et utilisent à leur profit les travers des gens de pouvoir,
2/ que le pouvoir (ou la mise en avant) d’une personne se faisant des ennemis, l’expose à la diffamation (montage réalisé à Julliard).
Le pouvoir peut donc corrompre celui qui en a et ceux qui gravitent autour de lui.
Ceci n’est pas sans rappeler des histoires médiatisées récemment où, parce qu’une personnalité aurait des travers connus et à juste titre réprouvés, cela autoriserait alors à s’en donner à cœur joie et sans scrupules (pour arriver à ses fins ou pour traîner dans la boue à partir de faits qui se seraient réalisés et de toutes façons prescrits).
Je viens de découvrir votre blog par un de vos coreligionnaire et vous en remercie beaucoup.
L.Bigné
Marc Rastoin
Merci pour ces remarques judicieuses ce me semble.