[L’Espion qui aimait les livres] Ce fut un roman posthume et, de ce genre d’entreprise, on peut légitimement craindre un coup éditorial sur un manuscrit inachevé. Mais le cas est en réalité différent. Écrit une bonne dizaine d’années avant sa mort, ce court roman, où l’on retrouve tout le talent stylistique et l’atmosphère des derniers Le Carré (des trente dernières années disons), avait été volontairement laissé dans le tiroir. Sentiment d’échec littéraire? volonté de le reprendre? Dans une postface suggestive, le plus jeune fils de fils de John Le Carré suggère un autre motif: sa dureté inédite envers ‘le Service’. Quoi qu’il en soit des motifs, c’est un Le Carré fort honorable: un homme encore jeune a quitté son job à la City pour devenir libraire dans une petit ville balnéaire. Mais quel est son rapport avec le ‘Service’ et pourquoi donc un mystérieux inconnu se prétend ami de son père et cherche à devenir son ‘ami’? Laila Maalouf écrit avec justesse: « Les personnages autant que les dialogues portent l’élégance d’une autre époque et le flegme caractéristique des romans de John le Carré » (La Presse, 2021).