Le parcours proposé par cet ouvrage court et très dense est original mais il convient de ne pas se méprendre sur sa nature. On n’y trouvera aucune analyse des textes évangéliques sur la résurrection de Jésus à la façon d’un Joseph Ratzinger dans son dernier livre Jésus de Nazareth. De l’entrée à Jérusalem à la résurrection (Le Rocher, 2011). Le propos est différent et en quelque sorte plus subtil.
L’essentiel consiste en une exégèse serrée des passages où Saint Paul traite de la question de la résurrection, que ce soit celle de Jésus ou la nôtre (l’incontournable 1 Co 15, des passages de la deuxième lettre aux Corinthiens). L’enquête s’étend aussi à la tradition paulinienne (Ep 5,14 et 2 Tm 2,11-13). Chemin faisant, l’auteur aura analysé longuement le chapitre de Marc (12,18-27) où Jésus évoque sa conception de la résurrection. Son analyse suggestive est proche, quoique distincte, de celle de John P. Meier. Le lecteur devra parfois s’armer de patience pour traverser d’austères démonstrations exégétiques, mais il sera frappé par la finesse des analyses. Le titre emprunté à Jean attire notre attention sur l’originalité forte de formulations du Nouveau Testament où le Christ lui-même semble être l’agent, d’une part, de sa propre résurrection et, d’autre part, de la nôtre. Pourtant, l’immense majorité des témoignages n’insistent-ils pas sur le fait que c’est bien Dieu qui a ressuscité Jésus ? Est-ce une évolution tardive ou une spécificité johannique ? Est-ce un abus de langage ? Michel Gourgues montre que cette façon de parler a des racines anciennes et que la tradition paulinienne contient des formulations analogues. Ainsi en 1 Co 15,45, le Christ est appelé « esprit vivifiant » et surtout dans la lettre aux Philippiens 3,21, il est dit que « le Seigneur Jésus Christ transfigurera notre corps de misère pour le conformer à son corps de gloire. » Ainsi, « avec Ep 5,14, nous sommes en présence d’une des affirmations plus anciennes de la foi en la résurrection à la suite du Christ. Ce qui est frappant c’est […] la certitude d’une participation déjà présente à la résurrection de ce dernier à travers l’expérience spirituelle du baptême. La résurrection à la suite du Christ, avant d’être célébrée en lien avec l’horizon ultime de l’espérance, l’a été comme une expérience de communion déjà inaugurée à la vie du Ressuscité ». L’apport essentiel de ce livre est de souligner l’étroite connivence, dès le début de l’annonce chrétienne, entre la résurrection de Jésus et celle des croyants (ou de tout le monde en vue du jugement, selon les représentations), et les parallèles théologiques entre traditions paulinienne et johannique sur le rôle du Christ lui-même dans la résurrection des croyants.
Recension parue dans la revue Etudes en 2012