L’ouvrage de Larry Hurtado impressionne. Son objectif est de reprendre à frais nouveaux le livre de W. Bousset, Kyrios Christos (1913), qui influença tous les chercheurs depuis, notamment l’école de R. Bultmann avec E. Kaseman, G. Ebelin ou G. Borkmann. Il s’agit de faire le point sur l’émergence de la dévotion envers Jésus, adoré comme Dieu de 30 à 170 environ après Jésus-Christ. Le plan est clair et l’écriture facile à suivre. Néanmoins, la masse des documents traités et l’ampleur de cette somme peut refroidir les ardeurs des plus audacieux. L. H Hurtado fait avec le christianisme primitif ce que John P. Meier fait pour la personne de Jésus. Il propose une analyse historique et sociologique des facteurs qui ont permis l’émergence de ce nouveau phénomène qu’est le christianisme afin de mieux percevoir la nature de cette religion. Une de ses convictions les plus profondes, certainement juste, est que pour comprendre ce que croit une religion, il ne suffit pas de se pencher sur son credo et d’analyser les disputes théologiques ; il faut aussi se plonger dans sa liturgie, ses prières et sa dévotion. Là sera mieux perçu ce qui est au coeur de la foi. La thèse centrale de L. H Hurtado est de considérer que les traces historiques témoignent d’une explosion subite et forte de la dévotion à Jésus en milieu judéo-chrétien : « les origines se situent dans les cercles chrétiens juifs des toutes premières années », là où W. Bousset postulait un christianisme « judéo-palestinien » très différent du judaïsme hellénistique et supposait que l’adoration de Jésus était venue via l’influence des religions païennes. En présentant de façon argumentée et historique les origines bibliques et juives du mouvement chrétien, L. H Hurtado tourne définitivement la page de ces exégètes libéraux allemands façon W. Bousset, pour qui le christianisme se devait d’être le plus éloigné possible du judaïsme pour être crédible.
Recension parue dans la revue Etudes en 2009