L’auteur accepte la proposition d’un ami, le meilleur photographe animalier du onde, d’aller au Tibet s’embusquer des heures par moins 30 degrés en espérant, peut-être, pouvoir apercevoir la légendaire panthère des neiges. Sylvain Tesson nous livre un nouveau récit à hauteur d’hommes, très personnel et magnifiquement écrit (on devine souvent le poète derrière le prosateur). Il fait l’éloge, au fond, de la solitude, du silence, de la méditation. Il évoque en passant la foi de son enfance mais c’est un monde disparu (quoique non jugé) et il en reste à une forme de stoïcisme discret qui est, me semble-t-il, assez fréquent chez les meilleurs des agnostiques d’aujourd’hui. Tout autant qu’une belle plongée dans le Tibet (et le monde chinois, c’est-à-dire celui de la modernité capitaliste destructrice du monde), c’est une critique implicite et forte du monde tel qu’il va et dont l’auteur se reconnait être, et avoir été, complice par sa frénésie de déplacements, sa vie agitée et urbaine. Il ne prêche pas mais invite à une sobriété renouvelée, à prêter vraiment attention au monde qui nous entoure, celui des animaux certes mais, par ricochet pour ainsi dire, celui des humains: Simone Weil aurait, je crois, apprécié certains passages.