Un film de Anne Consigny avec elle-même et la famille de Narine. En Arménie, à Erevan, on vient de diagnostiquer une tumeur redoutable à la jeune Narine, la vingtaine. Ses parents modestes réussissent à l’envoyer en France se faire soigner grâce à un médecin franco-arménien. Pendant ce temps, une actrice française, Anne, cherche à louer une chambre pour améliorer ses fins de mois. Elle accueille Narine et sa maman. Une amitié profonde va se nouer avec Susanna, la mère de Narine, et l’amener, peu à peu, à rencontrer la famille au pays. Ce projet échappe aux catégories faciles: ce n’est ni un documentaire pur sucre ni un film classique: c’est une plongée dans l’humanité, celle de la douleur et du deuil, celle des sourires et des regards, celle qui se communique par-delà les barrières de la langue. En nous partageant le sort de cette jeune femme pleine de vie et de sa famille, Anne Consigny partage au fond un cadeau qui lui a été fait. Au contact de la dignité immense de cette famille « ordinaire », elle en reçoit comme un surcroît de vie et, paradoxalement, d’espérance. « Enterrer les morts et réparer les vivants » disait cette ultime phrase de Tchékhov qui habite ma mémoire depuis le livre qui s’en inspira. ‘Je prends ta peine’ (de l’arménien ‘tsavet tanem’: expression subtile et riche dont l’un des sens est: ‘je suis avec toi dans ta douleur’) est à la fois sobre et intense, éminemment personnel et universel, habité de nombreuses paroles et faisant place au silence, ayant au cœur la mort inéluctable (qui remarquablement n’est ni escamotée ni esthétisée mais vue de face) et nous parlant finalement de vie. Bref, nous sommes au cœur de notre humanité : nous affrontons les ténèbres et parfois, de leur sein même, surgit une lueur…