Cette dernière biographie d’Ignace a été écrite pour une collection consacrée aux Espagnols illustres par un historien spécialiste de François de Borgia. Elle a les défauts de ses qualités. Son ambition principale est de montrer Ignace dans son monde, dans son univers relationnel et familial. De ce fait, elle est touffue, peu synthétique et nous accable de centaines de noms sans vraie pédagogie. Elle abuse de certaines facilités comme celle qui consiste à dire: ‘Untel, qui sera plus tard jugé en Allemagne, était sans doute dans la ville de X. au même moment qu’Ignace et il n’est pas impossible qu’ils se soient rencontrés’. Certaines formulations des actions d’Ignace pourraient être plus heureuses sans pour autant tomber dans l’hagiographie (Ignace ‘dressa alors’ telle personne contre telle autre…) Elle comporte son lot de coquilles et de petites erreurs et fait l’impasse sur des éléments importants de la correspondance. D’un autre côté, elle réussit très bien à restituer l’atmosphère spirituelle de l’époque, le fait que pendant plusieurs années, des milieux réformateurs catholiques pouvaient abriter des personnes ayant entre elles des amitiés fortes alors même que, plus tard, certaines basculeraient dans la Réforme et d’autres dans l’opposition farouche à celle-ci. De même, il montre bien l’entrelacement complexe des dimensions politique et religieuse, la façon dont Ignace eut sans cesse à se défendre contre des ennemis puissants, à tirer le diable par la queue financièrement et aussi qu’il fut un grand médiateur, un homme de la conversation et du compromis, un homme d’action tout en étant presque toujours malade les quinze dernières années de sa vie. Bref, cet ouvrage se veut plus complémentaire que substitut des autres biographies et, une fois ses limites reconnues, il nous éclaire sur les conditions de naissance de la Compagnie et sa difficile première croissance.