Spécialiste de la littérature talmudique, l’auteur se lance dans un tout autre projet qui se penche sur l’écart entre le Dieu biblique (ou les dieux bibliques) et l’image courant de ‘Dieu’, formaté par la philosophie grecque qui en fait d’abord un être impersonnel, impassible, aimant, principiel. Il montre que le petit Dieu original appelé YHWH est un Dieu politiquement incorrect, jaloux, violent et irascible et qu’il a fallu toute une histoire pour qu’il devienne le Dieu majestueux du monothéisme. « Le récit biblique […] narre le déploiement historique du mythe de Yhwh ». Son propos rejoint ainsi, par certains côtés, le travail de Thomas Römer dans L’invention de Dieu et comporte aussi le côté personnel d’un israélien revisitant ses racines. L’auteur a l’immense mérite de rendre sa chair pour ainsi dire à Dieu-YHWH, de montrer qu’il est à la fois un personnage complexe (comme on le dit en littérature) et un être ambivalent, l’opposé d’un principe théorique ou abstrait. « C’est l’espoir qui a porté l’écriture de ce livre : rappeler qu’il y a toujours eu en Occident un dieu qui est un personnage avant d’être un principe ; une figure désirante avant d’être un cerveau flottant dans l’espace ». Cependant, la façon dont l’opposition-distinction entre Elohim et YHWH est présentée, me paraît quelque peu excessive et forcée. Certaines paraphrases du texte biblique selon cette clef sont à la fois un peu longues et pas entièrement convaincantes. Cela dit, c’est un livre original, justement impertinent et, de ce fait, suggestif et stimulant.