Ce ne sont pas les effets spéciaux ou la 3D (pourtant réussis de l’avis unanime) qui sont remarquables dans Gravity mais la densité humaine de l’histoire, celle d’une conversion à la vie, d’une renaissance à la foi.
Le Docteur Ryan a vécu la perte d’une petite fille de quatre ans et ce drame pèse sur sa vie. Son interlocuteur, son partenaire dans l’expédition, lui parle comme un frère en humanité en toute simplicité et avec beaucoup d’humour.
Finalement, c’est la question de la foi qui est le vrai sujet du film. La dimension religieuse de l’homme est montrée avec humour lorsqu’on aperçoit la petite icône puis le petit bouddha dans les stations russe et chinoise. Non pas la foi au sens de ‘quelle est ta religion ?’ ce qui n’aurait pas beaucoup de sens, mais la foi au sens, essentiel à tout être humain, de ‘qu’est-ce qui te fait vivre ?’, ‘qu’est-ce qui donne sens à ta vie?’. La foi comme ayant comme condition minimale la foi élémentaire en la valeur de ma vie. Si je ne crois pas moi-même que ma vie est aimable ou sauvable, comment pourrais-je croire qu’un Autre puisse être là pour la sauver ? Ryan semble ne plus désirer vivre. C’est le compagnonnage avec le vétéran Kowalski qui va lui servir de tremplin pour repartir.
Dans la scène clef du film, Kowalski – que nous savons être déjà mort – vient frapper à la fenêtre et lui indique quoi faire pour s’en sortir et ce au moment même où le désir de vivre abandonne Ryan. Il y a plusieurs manières de lire cette scène. On peut y voir, comme dans l’excellente critique de Geneviève Jurgensen dans La Croix (2 nov 2013), le travail dans l’inconscient des paroles de Kowalski. Ou, comme je l’avais vécu sur le moment, comme une sorte de rêve où Kowalski vient la visiter. Ce qui est certain, c’est que ce sont les mots et la bienveillance de Kowalski qui vont lui permettre de puiser dans cette foi élémentaire les forces de tenter une dernière manœuvre.
Vivre c’est expérimenter la force des liens qui se tissent entre humains et qui parlent plus fort que l’isolement mortifère qui nous guette toujours. Même si Ryan était morte à la fin (et après tout, ce serait quand même le plus plausible !), elle serait morte vivante alors qu’avant elle vivait mais comme une morte. Le dernier mot du film est « Merci », qui est le premier et le dernier mot de la foi. La foi comme gratitude, comme ce qui se joue dans la discrétion du chemin que prennent les mots d’un autre frère humain pour faire renaître le désir de vivre… Gracias Alfonso !