Dans ce court essai, à la fois ciselé et libre, l’auteur nous invite à une réflexion sur le ‘tact’, ce sens lié au toucher et qui qualifie pourtant un quelque chose de fin et précieux dans les relations humaines, indépendamment de tout toucher. Il en montre les échos dans le monde de la musique et de la parole (l’ouïe). De veine assez lévinassienne, un peu à la Merleau-Ponty également, l’auteur ne craint pas de mentionner L’ontologie du secret de Pierre Boutang (69) ou, à plusieurs reprises, Pascal (64). Bien que strictement philosophique, plusieurs passages m’ont fait penser à la façon dont Jésus déploie cette qualité de tact, qui n’exclut pas fermeté ou conviction bien au contraire, comme le montre bien l’auteur (par ex., 70: « une action qui soit non seulement déploiement de moyens en vue d’une fin mais aussi et surtout ‘retenue’ et ‘veille’). J’ai été le plus souvent en connivence avec lui, mais à l’occasion j’aurais aimé posé quelques questions: il me semble par exemple que la présentation du ‘récit’ (66) vise les récits ‘pleins’ pour ainsi dire mais qu’un récit peut aussi se dire avec tact et ne pas tout dire (comme le montre Robert Alter dans L’art du récit biblique) et je discuterais le jugement un peu négatif, lié à la définition choisie, de la mystique (97). Fréquentes sont les formules heureuses, tout autant que non apprêtés, qui donnent à penser et nous font sentir appelés à une plus grande humanité dans notre exercice du tact, qui ressemble aussi fortement à la discreta caritas dont parlait Maître Ignace.