Un film de Denis Villeneuve avec Timothée Chalamet, Rebecca Ferguson, Oscar Isaac, Jason Momoa, Javier Bardem, Zendaya. Je ne rentrerai pas dans le résumé, même bref, de l’intrigue (qui couvre ici la première moitié du livre): il suffit de dire qu’il n’est pas nécessaire d’avoir lu le livre pour comprendre le film et que, parallèlement, le film se veut – et est grosso modo – fidèle au livre. Maintenant, il est indubitable que la puissance imaginative déployée par le livre est, comme toujours dans ces cas-là (comme pour le Seigneur des Anneaux par exemple), formatée et réduite dans un film qui doit faire des choix (visuels comme narratifs). Sur le plan cinématographique, le film est presque parfait: une réalisation souple et belle, des acteurs au top (à la seule exception de la décevante Rebecca Ferguson), des images et une photo superbe. La musique de H. Zimmer fait bien le job mais de façon terriblement illustrative.
Il est mieux de ne pas lire ce qui suit si l’on n’a pas vu le film (même s’il n’y a pas de spoilers à proprement parler)
Sur le fond, j’ai été une nouvelle fois frappé par la dimension très religieuse du scénario de Dune: au fond, c’est un film sur la question messianique, et qui a, qui plus est, la rareté de combiner christologie et mariologie car la mère de l’Elu (qui pressent qu’un glaive lui transpercera le cœur) est très présente. Il me semble que plusieurs autres horizons sont en arrière-plan de Dune: la confrontation-fascination avec le monde musulman (comme dans Messiah, on retrouve le terme Mahdi et la langue des Fremen sonne plutôt sémitique (cf. le Lisan al Gaib et bien sûr Jihad (évité dans le film)), qui se joue aussi géographiquement avec le contraste entre une planète aqueuse (filmée en Norvège) et une planète désertique (filmée en Jordanie et à Abu Dhabi); on retrouve aussi la guerre du Vietnam et l’affrontement entre une armée ultra professionnelle et suréquipée qui cherche à détruire une résistance sur une terre qui n’est pas la sienne et des guérilleros qui se fondent dans le paysage et utilisent leur meilleure connaissance de l’environnement qui est le leur; il y a aussi la naissance d’un chef avec la question du destin (et de la prophétie) et de la vocation: assumer une charge que l’on porte dès la naissance peut-il encore être libre? Une vision de la vie où l’enjeu principal consiste à surmonter la peur (bien en phase donc avec la finale de Marc et les évangiles en général). Et, ce qui est assez rare pour être souligné, il y a un beau couple parental, celui formé de Leto et Jessica, qui suscite estime et amour chez leur fils Paul. Bref, Dune, une œuvre littéraire mythique et d’une grande richesse, a été transposée de façon narrativement honnête et visuellement crédible. Sans pouvoir bien sûr atteindre à l’impact prodigieux du livre, c’est une très belle réalisation qui illustre encore une fois le grand talent de Denis Villeneuve.