À l’heure où il est de bon ton de dénoncer l’avènement de la « post-truth société », Pierre Bayard nous offre, comme toujours, un livre intelligent et suggestif. Il souligne que l’être humain est un être de récits qui relèvent toujours, pour une part, d’un travail de reconfiguration imaginatif de nos existences, collective ou individuelle. En s’appuyant sur un certain nombre de cas connus ou moins connus, il observe que, parfois, des théories fondées sur des faits objectivement non avérés (comme Freud élaborant sa théorie de la sublimation à partit d’un Leonardo da Vinci asexué) ont pu être fécondes intellectuellement. Sa démythification du fameux portrait de Eichmann par Arendt est très intéressant (son Eichmann doit beaucoup plus à Heidegger – qu’elle a connu – qu’au réel Eichmann). À certains endroits, ce qu’il dit de certains récits est tout à fait pertinent pour comprendre certains traits des Écritures.