Difficile de décrire ce livre littéralement extra-ordinaire. C’est dans une entreprise folle que s’est lancé le romancier irlandais (célèbre pour son Let the Great World Spin de 2009): raconter la vie intérieure d’un père palestinien Bassam et d’un père israélien Rami, qui ont tous deux perdu une petite fille, Smadar victime d’un attentat suicide et Abir victime d’une balle en caoutchouc tiré par un soldat de Tsahal. Ces deux hommes, que tout sépare, vont pourtant se rencontrer dans une groupe de parents dont les enfants ont été tués dans le conflit: ils vont mettre des mots sur leur douleur et parcourir leur(s) pays et le monde en redonnant vie, soir après soir, à leur merveilleuse petite fille, intelligente et pleine de vie dans les deux cas… Et l’affaire se complique encore lorsqu’on sait que c’est une histoire vraie… Colum a longuement rencontré ces deux hommes, leur femme, leur famille et leurs proches. Le style narratif est le sien, tout comme la construction non linéaire typique de l’auteur, mais les pensées, les sentiments, des deux papas, sont les leurs dans une immense mesure. Même si le style narratif en spirale, par courts paragraphes numérotés, n’est pas celui que je préfère, j’ai été saisi par la force incroyable de certains passages. Rarement la réalité du conflit israélo-palestinien aura été montrée avec autant de justesse. En nous présentant ces hommes, ces pères, en évoquant leurs pudeurs, leurs larmes, leurs souvenirs, leur résilience et leur incroyable force morale, l’auteur nous touche très profond en nous parlant au fond d’humanité, de foi et d’amour surgissant dans ce qui est leur exact contraire…