Un film de Justine Triet avec Sandra Hüller, Swann Arlaud, Antoine Reinartz, Samuel Theis. Dans un chalet isolé, non loin de Grenoble, vit un couple d’artistes: il est français, musicien, mais rêve d’écriture; elle est allemande et écrivaine. Ils ont longtemps vécu à Londres et communiquent essentiellement en anglais. Ils ont un fils de onze ans qui est aveugle: Daniel. En rentrant de balade avec son chien, le fils trouve le père mort au pied de la maison suite à une chute. Que s’est-il passé? Le film combine une enquête policière, conduite de façon très réaliste (avec l’intervention des experts par exemples) et une réflexion sur la vérité – et la chute – d’un couple. Jalousies possibles, contraintes du quotidien (dettes, réparations, job ‘alimentaire’) et l’ombre de la culpabilité sur l’origine du handicap du fils. Aux deux tiers du film, une scène de dispute est d’une puissance émotionnelle incroyable, grâce à un texte d’un réalisme total. On obtient ainsi comme une sorte de croisement entre un Hitchcock pour le scénario et un Florian Zeller pour la capacité à élaborer des dialogues justes. Sandra Hüller révèle une nouvelle fois l’étendue de son talent et porte le film. La réalisation est excellente aussi. Malgré une intrigue qui peut paraître convenue, les scénaristes ont réussi à créer un ton original, fait de dialogues crédibles psychologiquement complexes. Mon seul bémol (léger), classique, est que la dernière demi-heure est trop longue et que ce film de 150 minutes aurait gagné à en faire 20 de moins. Mais la Palme d’Or du Festival de Cannes 2023 me paraît justifié. C’est un film à l’issue duquel on sent à la fois le besoin de méditer en silence sur la condition humaine et de parler pour relire le film avec les personnes avec lesquels on l’a vu.